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  • Photo du rédacteurEmma Fourreau

Nouvelle affaire Polanski : le « J’accuse » de Valentine Monnier

Depuis la publication du témoignage de Valentine Monnier dans les colonnes du Parisien, vendredi 8 novembre, la parole se libère, ou presque. Son accusation a rejoint celles des autres femmes qui ont accusé Roman Polanski de viol au cours des dernières décennies. Et comme à chaque fois, deux clans s’opposent : ceux qui apportent leur soutien à la photographe et les fervents défenseurs du réalisateur.


1. L’accusation de Valentine Monnier


Dans un témoignage exclusif publié par le Parisien, Valentine Monnier revient sur des faits qui se sont déroulés il y a quarante-quatre ans. « En 1975, j’ai été violée par Roman Polanski. Je n’avais aucun lien avec lui, ni personnel ni professionnel, et le connaissais à peine. […] Ce fut d’une extrême violence, après une descente de ski, dans son chalet, à Gstaad [Suisse]. Il me frappa, me roua de coups jusqu’à ma reddition puis me viola en me faisant subir toutes les vicissitudes. Je venais d’avoir 18 ans […]. J’ai cru mourir. »


Effrayée par les conséquences, cette photographe, actrice et ex-mannequin n’avait pas trouvé la force d’en parler avant aujourd’hui. Ce qui l’a motivé pour porter son accusation de manière publique, c’est la sortie du nouveau film de Roman Polanski. « J’accuse », film qui traite de l’affaire Dreyfus, aborde un thème important pour la photographe : l’erreur judiciaire. Même si les faits sont prescrits depuis de nombreuses années, Valentine Monnier souhaite participer à la lutte contre l’impunité des agresseurs sexuels mise en place « par une nouvelle génération d’artistes, de journalistes, d’intellectuels, de politiques ».


2. La réponse de Roman Polanski


L’accusation de Valentine Monnier, la première faite par une française, s’ajoute à celles portées par plusieurs femmes au cours des dernières décennies, toutes niées en bloc par la réalisateur et son équipe judiciaire. « M. Polanski conteste avec la plus grande fermeté cette accusation de viol, affirme Me Hervé Temime, dans un communiqué transmis à l’AFP. Nous travaillons aux suites judiciaires à apporter à cette publication. »


« Si ces faits sont prescrits depuis plus de trente ans, c’est aussi parce qu’il est impossible après une telle durée de recueillir tous les éléments nécessaires à une enquête respectant les critères requis par l’administration d’une bonne justice », poursuit l’avocat de Roman Polanski. Samantha Gailey, Charlotte Lewis, Robin M, Renate Langer, Marianne Barnard et enfin Valentine Monnier. Les accusations de toutes ces femmes sont « sans fondement », déclarait l'avocat de Roman Polanski en 2017. Sachant que, « à sa connaissance, aucune procédure judiciaire, autre que celle concernant l'affaire Gailey », n'est engagée contre son client, Me Temine clame que ce témoignage a pour unique but de nuire à son client juste avant la sortie de son dernier film.


Valentine Monnier est la première française à accuser Roman Polanski de viol. Photo DR


3. Les divisions du monde du cinéma


Toujours poursuivi par la justice américaine dans le cadre d’une procédure pour détournement de mineure lancée en 1977, le cas de Roman Polanski continue de diviser la France, avec une scission forte au sein même du monde du cinéma. Par exemple, en 2017, des femmes avaient manifesté en France contre une rétrospective qui lui était consacrée à la Cinémathèque. La même année, il avait renoncé à présider les Césars. Le cinéaste avait cependant été soutenu par Alain Terzian, justifiant ce choix comme « indiscutable ».


Valentine Monnier est la cinquième femme à accuser officiellement Roman Polanski de viol. Depuis l’émergence du mouvement #MeToo, toute l’actualité cinématographique du réalisateur est scrutée et crée la polémique.


Si le monde du cinéma est resté majoritairement silencieux face à ce témoignage, l’actrice Adèle Haenel, qui a elle-même dénoncé récemment des attouchements lorsqu’elle était adolescente, appelle à soutenir la photographe. « Je soutiens entièrement la démarche de Valentine Monnier et je sors bouleversée de la lecture de son témoignage. Je la crois », affirme-t-elle. Face à cette absence de réaction, Valentine Monnier dénonce l’attitude d’un « inconditionnel cénacle d’intellectuels et d’artistes persistant à soutenir Roman Polanski malgré de nombreuses autres accusations de viol ».



À l'inverse, le réalisateur – récompensé par des césars, un oscar et une palme d’or au fil de sa carrière – a reçu le soutien de nombreuses personnalités françaises pour cette affaire, tout comme pour toutes les autres affaires dans lesquelles il a été accusé. « Ça fait quarante ans. Le pardon est nécessaire dans la société », a observé récemment le réalisateur Costa-Gavras, président de la Cinémathèque française. Cet été, le directeur de la Mostra, Alberto Barbera, a plaidé pour « faire une distinction très claire entre l’homme et l’artiste ». De même, Catherine Deneuve, la meilleure avocate du réalisateur, l'a de nouveau défendu avant la Mostra de Venise, tout comme elle l’a fait au fil des ans et des scandales.


Roman Polanski est un cas représentatif de la puissance des grands hommes du cinéma. Parler ne va pas régler tous les problèmes et la justice ne sera pas forcément juste ou même, dans ce cas-là, saisie. Mais c'est un pas de plus vers la vérité. Comme l'affirme Adèle Haenel, la démarche de Valentine Monnier « suscite d’autant plus d’admiration que son agresseur est puissant ».

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